21 octobre 2013

Quel cirque que ce pays d’Haïti !

Par Thélyson Orélien

Mais comment parler de Justice, quand les juges ont peur de rendre justice? Quand des potentats de la Police nationale sont de mèche avec des bandits?

Comment oserait-on parler de Progrès quand on traîne le population dans la boue, dans le black-out total ? Comment parler de Développement quand la faim tenaille les intestins de la majorité de la population? À entendre les dirigeants haïtiens, on risque d’avoir l’impression que tout est réglé en Haïti.

Quelques bien-pensants vont juger que ce n’est pas nécessaire que j’en parle ici, sur Internet, surtout, qu’il ne faut pas mettre des entraves au beau projet de relance de l’industrie touristique du pays. Peut-être que c’est très réservé et prudent de boucher ses narines pour mieux avaler l’eau qui pue, mais il est aussi nécessaire de parler des vrais problèmes de ce pays, pour une fois au moins, sans peur ni crainte.

La Justice, le Progrès et le Développement sont de vains mots. Ils sont sans cesse avalés par la politique, l’insécurité, la pauvreté et l’insalubrité en Haïti. Selon l’Agence France Presse, plusieurs milliers de personnes ont encore manifesté, jeudi dix-sept octobre, dans les rues de la capitale, Port-au-Prince, et de la deuxième ville du pays, Cap-Haïtien, contre la faim, le chômage, et pour réclamer la démission du régime en place. Ces voix meurtries et sans voie, seront-elles écoutées, enfin?

Bientôt quatre ans après le tremblement de terre sans nom, on en rêve toutefois. Quatre ans après, Haïti est toujours à genoux, enfoncée jusqu’au cou, dans les sables mouvants de la misère et de l’insécurité. 1103 jours après le premier cas de l’épidémie importée des Casques bleus de la Mission onusienne en Haïti, quelle justice pour ces nouveaux pauvres? Il n’y a que celle des puissants.

Haïti est à genoux, et le gouvernement ne cesse pas de nous mentir sur tous les chiffres. Fêtant en grandes pompes, sur toutes les places publiques, les deux années de son accession au pouvoir. Pendant ce temps, se dresse à l’horizon, un bilan décevant, le taux d’emploi est passé de 5,6% en 2011 à 2,8% en 2013, et le président de la République, sans vergogne, a affirmé que 400 000 nouveaux emplois ont été créés. Mais où? La ministre des Finances, refusant de corroborer cette version mensongère a été mise à la porte.

La mauvaise gestion du projet Pétro Caribe bat de l’aile, et tous les projets éducatifs se réduisent à l’envoi de 6 000 000 d’enfants à l’école fondamentale d’ici 2016, pour une population totale de 10 413 211 habitants sur 27 750 kilomètres carrés. Le gouvernement revendique avoir déjà envoyé 1 288 956 enfants à l’école, on l’espère bien, mais l’enseignement universitaire est nettement négligé. Les chiffres parlent et ne mentent pas. Vive la statistique !

Le bilan du gouvernement Martelly-Lamothe ne répond pas aux aspirations du peuple haïtien, malgré carnaval sur carnaval et mariage princier pour séduire les yeux les plus naïfs. La manif de la semaine dernière le prouve.

Aujourd’hui, on nous parle d’élections. Des élections qu’on ne pourra pas contester, tant elles seront vraisemblables, tant elles auront l’air d’être potables. Des élections à venir, comme si ce sont elles qui doivent nous conduire au port de la Justice, du Progrès et du Développement. Je vous le jure mes amis-es, que ce jour-là, il y aura quelques 45 partis politiques engagés dans la course. 45 partis, de ceux qui s’y connaissent bien dans l’art d’entraver le fonctionnement du pays, de la Justice, du Progrès et du Développement.

Après les résultats, faudra-t-il bien se poser la question: la Justice, le Progrès et le Développement, avec quels acteurs? En Haïti, ils sont des centaines d’hommes et de femmes cravatés et costumés, malgré la canicule, à faire le guet devant un Bureau électoral pour s’inscrire et espérer devenir les acteurs du changement. Du vrai cirque, quoi ! Et c’est par ce moyen même qu’on a eu aujourd’hui, l’homme qui ne sait que chanter aux timons des affaires de l’État. Mais, pourquoi j’en parle?

Il n’y a qu’une chose qui soit sûre dans ce pays, c’est que les fonds publics seront tôt ou tard, expatriés un peu partout à travers le monde pendant au moins dix ans. Dix ans : un-zéro. Dix ans. Dix, ça porte malheur. Quelqu’un a osé en politique dire dix ans, il est parti la même année. Dix : un-zéro. Dix ans : deux mandats présidentiels. Les mandats, voici ce qui tient encore en vie notre pays, Haïti.

PS : Après ce que je viens de dire, ne croyez-vous pas, mes amis-es, que je mérite une prime d’assurances? 😉

Thélyson Orélien
parchipel@yahoo.ca

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PHOTO SWOAN PARKER, ARCHIVES REUTERS | Des manifestants anti-Martelly dans les rues de la 2e ville du pays, Cap-Haïtien.

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